Chiens de traîneaux – Dernière partie – Les journées

beaux contrastes

Vous devez vous dire : ils n’ont quand même pas fait 2360 kms aller et retour juste pour bivouaquer.

Non, bien sûr.

Tout est prêt. Les chiens attelés n’ont plus qu’une idée, partir. Les traîneaux sont solidement attachés à un arbre, avec un noeud marin qui théoriquement se dénoue facilement quand l’homme le sollicite mais qui doit résister aux violents à-coups donnés par les chiens. Et ils tirent de toute leur énergie. Ils bondissent, se campent  debout dans leur harnais pour avoir plus de puissance. Moi je me dépêche. Vite le bonnet, vite le gant que j’avais bêtement enlevé pour faire un truc, vite je grimpe sur le patin arrière, je me cramponne, Christophe lance un « on est prêt ? » je n’ai pas le temps de répondre et nous voilà partis, à fond, droit devant, durant ….. Oh ! Surprise ! Durant un kilomètre peut-être … ah ! C’est tout ? Ils ont quoi les petits chiens ? Ils sont déjà fatigués ?

Non, c’est comme ça, après un départ digne de la Yukon Quest, ils prennent leur vitesse de croisière.

nous devant droit devant

Et Jean-Paul ?

Il est seul avec son traîneau et ses huit chiens, pas plus entraîné que moi car, pour lui aussi, c’est la première fois. L’avantage c’est qu’il est plus fort, plus calme, et qu’il a fait de la voile, donc les nœuds de marin ça le connaît. Mais si le nœud n’est pas exactement à portée de main quand on est fin prêt, sur le patin, en position de départ, ou, s’il résiste, alors … arrive ce qui doit arriver. C’est ainsi qu’un matin comme les autres, froid et ensoleillé, Jean-Paul qui n’était pas bien calé sur son patin quand  les chiens se sont élancés rata son départ.

« Hors de question de les laisser partir sans moi » se dit-il.

Il s’accrocha avec les mains et se laissa tirer espérant remonter. La neige était profonde. Elle recouvrait d’un manteau blanc et ondulé les arbustes les rendant invisibles. Le sol céda, s’enfonçant brusquement  au passage de Jean-Paul  trainé par l’attelage.

Christophe et moi étions partis devant et nous ne pouvions pas faire grand- chose. Pesant de tout notre poids sur le frein nous essayions d’arrêter notre traîneau. Le musher donnait de la voix espérant calmer le jeu le plus vite possible. Les chiens finirent par ralentir. Jean Paul se rétablit, à genou tout d’abord, puis debout.

Ouf ! J’ai eu un peu peur.

Jp loin derrière

jp derrière

Pendant les pauses et au départ : une corde autour d’un arbre avec un nœud marin ou, quand il n’y a pas d’arbre, une ancre à neige qui s’enfonce, créant une résistance lorsque les chiens tirent.

l'attache

L’arrêt : Le frein car il y a bien un frein est constitué d’un tapis de caoutchouc qui va d’un patin à l’autre, sur lequel sont vissés des vis et des boulons assez longs pour dépasser. Plus on appuie plus ça freine, mais il n’y a pas d’arrêt immédiat.

Les changements de direction : Le musher guide les chiens à la voix, avec des ordres précis et ils obéissent, enfin, le plus souvent, comme on peut le voir sur les photos suivantes.

CHIENS 4

CHIEN 2

Et moi dans tout ça : N’allez pas m’imaginer assise sur le traîneau, entre le poêle et les capelans gelés. Non ce n’est pas du tout  ça l’aventure à chiens de traîneaux.

En pleine forêt c’est du sport pour guider l’équipage entre les arbres. Rien ne doit s’accrocher et le traîneau ne doit pas se renverser alors on se met à deux sur le même patin pour tenir la charge, rétablir l’équilibre, n’oubliez pas les arbustes ils sont dessous, et ne présentent qu’un appui relatif.

Comme je me débrouillais bien, pensais-je, j’eu le droit de conduire le petit  traîneau de huit chiens (l’autre en avait douze) toute seule, durant une journée.

Quelle fierté. Je fus même désignée pour choisir l’emplacement de bivouac, au soleil, comme je le réclamais chaque jour. Christophe devait en avoir assez de m’entendre râler.

Le lendemain, Christophe qui avait joué le jeu, m’expliqua que mon choix n’avait pas été judicieux.

« Pourquoi ? le coin n’était pas bien ? Tu ne pouvais pas me le dire ? » rétorquai-je.

Mon coin n’était autre qu’une rivière gelée et couverte de neige. Les « petits chiens » avaient terminé leur nuit sur la glace, leur chaleur ayant fait fondre la neige …. Zut je n’étais pas fière, tout ça pour mon petit confort, un bivouac au soleil.

H97CHIENStroisième camp au matin
Au matin les « petits chiens » dormaient sur la glace, ça se voit seulement quand ils se lèvent, leur chaleur a creusé un trou.

Le circuit : Et bien …. Quatre jours ou plutôt une vingtaine d’heures, 4h à 5h par jour, en boucle au milieu de nulle part quelque part vers Natashquan, patrie de Gilles Vigneault, un compositeur et chanteur Québécois, au-delà de la Baie Johan Beetz. Vous avez regardé sur Google Earth ou Map ?  Allez trouver un touriste assez fou pour aller si loin en plein hiver.

Le paysage est assez plat et, devinez, couvert de neige ce qui le rend encore plus plat. De piste il n’y en a point de tracée, par endroit une motoneige est passée, ailleurs il y a des arbres morts en croix pour marquer l’itinéraire.

ma préférée

Mais c’est beau. On est heureux.

Le midi on s’arrête un peu, on fait un grand feu, on grille des saucisses. Les chiens se reposent.

Ne dites pas que je vous l’ai dit mais, les chiens cherchent tous les prétextes pour se reposer je les ai vu faire.

Je pense qu’ils sont heureux eux aussi.

On cherche la route
On cherche la route

Le repas de midi se prépare

JP va se régaler
Jean-Paul va faire griller son pain de mie sur le feu.

Hot dog pour midi

Tout a une fin …

Pourtant quand j’aperçu la route sur laquelle nous avions garé remorques et voitures l’idée que ce n’était pas tout à fait fini me vint rapidement.

Tant mieux, nous n’étions pas pressés.

Chiens, traîneaux, tente, poêle etc…, nous dûmes tout embarquer et en route pour Rivière St Jean où nous attendait, la chaleur d’un home douillet, et un sympathique repas à base de viande de phoque que nous mangions pour la première fois.

Nos hôtes mushers avaient bien fait les choses.

S’ils me lisent, sait-on jamais, nous les remercions encore pour l’aventure que nous avons pu vivre grâce à eux. C’est une vieille histoire mais elle est restée très précise dans nos souvenirs, j’ai eu beaucoup de plaisir à me la remémorer et à la partager.

Un petit sondage auprès de mes lecteurs. A ceux, rares sûrement, qui auront eu le courage de lire les trois articles sur chiens de traîneaux  : pouvez-vous  indiquer un truc comme « tout lu » dans vos commentaires?

 

 

 

 

 

24 réflexions sur “Chiens de traîneaux – Dernière partie – Les journées

  1. J’ai adoré tes 3 articles ! Je les montrerai à mon copain quand il rentrera du boulot.
    Ça donne vraiment envie de passer une expérience telle que la tienne avec les chiens de traîneaux, j’espère que depuis ce temps ce ne sera pas trop devenu touristique car c’est sur, cet hiver je mets ça au programme !! 😊

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    1. Tu sais , héla! on se dit souvent que les aventures que l’on a vécues il y a vingt ans seraient beaucoup plus difficiles aujourd’hui.
      Depuis l’article j’ai recherché nos Mushers et je ne les ai pas retrouvés, je crois qu’ils vivent en Thaïlande !!
      La recette est de chercher l’exceptionnel et d’organiser soi même au maximum sans se greffer à un groupe. On a eu leur adresse au bout du bout .. ils venaient juste de s’installer on se demande parfois si on n’a pas été leurs seuls clients ( vu la distance en plein hiver pour y aller) mais si on aime l’aventure il y a toujours moyen, en cherchant bien. Et raconte nous…

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  2. Bonjour Marie-Blanche,

    J’ai cherché sur ton blog un formulaire de contact ou une adresse mail, mais n’ayant rien trouvé je suis retournée sur cet article, avec tes petits chiens.

    Je voulais te dire que j’ai eu une demande d’Angélique, une élève du Lycée de Longchamp (21), qui m’a sollicitée pour publier sur mon blog la brique végétale qu’elle a créée.
    J’ai trouvé son idée originale et nous avons rédigé un article qui parait demain matin.

    Lorsque tu recevras le mail de publication de cet article, ce serait sympa pour elle d’aller le lire, cela l’encouragerait à continuer.
    Et si tu l’apprécies, n’hésite pas à Aimer et à poster des commentaires et questions : elle te donnera tous les détails et renseignements que tu voudras.

    Merci d’avance pour elle !
    Bonne journée
    Sylvie

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  3. Bonjour Marie-Blanche,
    Moi aussi j’ai tout lu. Je connais ce Québec que tu as visité. Mais nous n’y sommes allés que l’été. Je suis avec beaucoup d’intérêt ton récit, si bien écrit.
    Merci de me faire voyager , dans ce pays où il fait si froid l’hiver.
    Je serai curieuse de suivre tes autres destinations.
    Bonne journée à toi !

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    1. Bonjour Claude,
      Merci, je ne savais pas si réellement des amis de blog auraient la patience de tout lire. Je suis agréablement surprise et encouragée.J’avais repéré depuis le début ton avatar qui un jour, sculpture de neige éphémère a trôné sur les Plaines d’Abraham durant un carnaval de Québec, le savais-tu quand tu l’as choisi ? En tous cas il est bien choisi. A bientôt donc car je vais venir faire un tour chez toi.

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  4. Bonjour Marie-Blanche, j’ai tout lu avec un grand intérêt, vous avez une belle plume. Et dommage que la caméra GOPRO n’existait pas à cette époque… : ) Son et image durant la ballade…OUF Comme si nous y étions. Faut bien vivre au Québec pour ne pas l’avoir vécu. : ) Où sera votre prochaine aventure….

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      1. Excellent choix, je vous voit allez à la rencontre d’une tribu autochtone dans cette jungle, ou encore traverser le désert en chameau : ) Je vous souhaites de vivre d’autres belles émotions.

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  5. Bonjour Marie-Blanche,
    Oh, que j’aurais aimé faire cette ballade avec vous !
    J’ai déjà pris le bac à Tadussac, mais c’était en été et il faisait un super soleil…
    Alors voilà, je suis la première à te dire que tes articles m’ont enchantée. Mais je ne serai certainement pas la seule. J’ai trouvé le premier moins poëtique, moins que les 2 derniers.
    Ce qui est bien dans ton récit, c’est que tu racontes tout, mais tu ne fais pas comme les auteurs à succès (pour leur porte-monnaie) en en mettant des tartines pour faire du remplissage.
    Tu me donnes de plus en plus de faire comme toi !
    Bonne journée
    Sylvie

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    1. Vas-y lance toi. C’est le MOOC qui a été le point de départ mais je me disais que sous une forme ou une autre il fallait que je le fasse. Un ami m’a prêté pendant deux ans un scanner Nikon à diapos, c’était une à une, mais faisable. J’ai également des photos dans des albums que je scanne. Pou l’histoire elle revient toute seule, je m’y revois, c’est génial. Si un jour mes petits enfants se pose la question de qui était mamie j’aimerais qu’à travers ce blog ils trouvent une partie de la réponse . C’est aussi pour ça que j’ai eu envie de le faire. Merci pour ton commentaire encourageant. Si tu te lances je suivrai ton blog.

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      1. Bonjour Marie-Blanche,
        Merci pour tes encouragements, mais je ne peux vraiment pas à cause du temps que cela prend de scanner photos, négatifs et diapos. J’avais commencé celles de mon fils bébé, mais je n’avais pas terminé que je devais tout recommencer. La définition de ces premiers scans n’étaient pas suffisamment bons et aujourd’hui il est impossible de les faire imprimer via internet car ils sont refusés pour « définition insuffisante » ! Quand Shiva aura porté sur moi son attention, je m’y mettrai de suite 😉
        Bon choix l’Australie, nous avons projeté d’y aller quand nous serons en retraite pour pouvoir y rester plusieurs mois. C’est que c’est immense comme pays.
        J’ai vu que vous aviez fait de la moto en Asie, vous n’aviez pas peur !
        Bonne journée
        Sylvie

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